Cet article sur la paix, la fraternité, est dédié à une amie mienne qui se reconnaîtra.
Akimiti, vous vous en souvenez, signifie veilleuse …
Tous les ans, notre famille se rend à Verdun. Verdun où tant et tant d’ancêtres de France et d’ailleurs ont laissé leur vie ou une partie de leur corps puisque toutes les unités ont dû, à un moment de la guerre, se battre à Verdun.
Le monument de l’Ossuaire de Douaumont dépend d’une association privée mais je ne doute pas qu’en cas de défaillance, l’État continuerait à entretenir ce lieu d’épouvante et, maintenant, de grand silence.
Tous les élèves devraient obligatoirement passer ici, où, désormais, dans cet immense ossuaire, reposent ensemble les corps des protagonistes. D’ailleurs, sur le parking, il y a autant de voitures françaises qu’allemandes et mêmes d’autres nationalités.
Rien, aucune vidéo, aucune photo, ne peut rendre l’émotion, le désarroi, l’incompréhension, la compassion que l’on ressent dans cette région ; certains villages, complètement détruits, ne figurent plus que par une borne rappelant leur existence.
On ne peut pas se promener, on n’en n’a d’ailleurs aucune envie, dans la forêt – la jeune forêt puisqu’il n’y avait plus rien, plus aucun arbre – trouée des marques des obus, des lignes des tranchées. Des animaux continuent à mourir ici, en sautant sur des obus non explosés. Quarante mille corps non retrouvés reposent dans cette nature, l’Ossuaire de Douaumont en comportant 150 000, non identifiés.
L’un des endroits les plus émouvants est le modeste monument de la tranchée des baïonnettes.
Je ne vais pas vous faire un cours d’histoire, mais je vous donne le lien sur le portail de la première guerre mondiale sur Wikipedia
Des vidéos sur cette bataille :
Les soldats, de quelque bord qu’ils fussent, se trouvaient dans les mêmes conditions, victimes, tous victimes de la folie de quelques uns, et il n’y a pas de doute sur le fait qu’ils aient fraternisé à certains moments.
Je vous donne également un lien sur les pigeons voyageurs de Verdun qui ont été utilisés comme moyen de communication.
Le dernier envoyé contenait ce message : “« Nous tenons toujours, mais nous subissons une attaque par les gaz et les fumées très dangereuses. Il y a urgence à nous dégager. Faites-nous donner de suite toute communication optique par Souville, qui ne répond pas à nos appels. C’est mon dernier pigeon. Signé : Raynal.»
Ce pigeon a survécu et a été cité à l’Ordre de la Nation. Vous trouverez l’histoire ICI
Voilà, rien à ajouter. Vivons, et vivons dans la paix.
Il y a d’ailleurs un dessin animé pour enfants, Vaillant, qui raconte l’histoire de pigeons porteurs de messages en temps de guerre. A la fin du film, dédicace est faite aux animaux (pigeons mais aussi chiens notamment) ayant servi à lutter contre l’ennemi. Plusieurs animaux ont été cités à l’Ordre du Mérite.
Quand on pense qu’ils ont remis ça en 1939…et que depuis que les hommes ont dit :”paix et sûreté!!!”, les conflits se sont multipliés aux quatre coins du monde.
Plus sordides, plus sombres, sur fond de cérémonies de commémorations.
Combien de jeunes gens sont morts pour rien dans ces tranchées?
Certains étaient de jeunes pères, jeunes mariés, d’autres encore adolescents.
Combien meurent encore aujourd’hui?
Si l’on y réfléchit plus avant, on réalise que peut d’endroits sur cette terre n’ont pas vu violence et sang versé…pour rien.
Il y a quelques années, des obus de la seconde guerre ont été retrouvés dans le jardin d’un particulier, à quelques kilomètres de chez moi…°o°
Ah! quelqu’un, un grand roi, a dit qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil, seulement le temps passe et l’on ne se souvient plus.
C’est hélàs trop vrai.
Mon grand-père était un rescapé de la “Grande Guerre” (pourquoi la nommer ainsi? Il en parlait très peu mais je me souviendrai
toujours du jour où il m’a raconté les jeunes gens fusillés parce qu’ils refusaient d’aller au combat. Et ça, ça marque !
L’Homme étant ce qu’il est, il y aura toujours, hélas, des luttes et des combats, ET fraticides ET racistes ET conquérants. Même l’éducation n’y peut rien.
Pour moi, il y a des terres qui pleurent des larmes de sang et si je devais passer en ce lieu, je prierais pour la paix de toutes ces âmes, comme les indiens d’autrefois, chaque jour je rendrais un hommage de vie, et, restes d’anciens rituels, des lumières, des lucioles pour dire que leur soufflen’est pas parti pour rien
Cette mémoire est de tous les peuples et de toutes les souffrances et de toutes les misérables époques
J’aime juste à retenir que la mort appelle la vie
Il n’y a que dans les romans que l’on ose le “guerre et paix”
C’est bête je ne me souviens plus du titre de ce merveilleux film, encourageant la fraternité entre les hommes englués dans les tranchées et se reconnaissant enfin “homme debout”
Nansou, merci de ces précisions. Je ne savais pas que plusieurs animaux avaient été cités à l’Ordre du Mérite.
Dans le prochain article qui va suivre immédiatement celui-ci – et ensuite on passera aux choses plus gaies – tu verras, il sera question des animaux, des ânes.
Nandini, on pourrait désespérer n’est-ce-pas ?
Quelle terre de misère. Mais autant je désire faire mémoire à ceux qui ont souffert et sont morts, autant j’aime la vie.
Et mon devoir de mère est d’apprendre aussi aux miens que je crois à la victoire de l’espérance sur l’expérience. Et de les charger de transmettre la connaissance du tout, le bon et le mauvais, à leurs propres enfants.
Kat, là où il y a de l’homme il y a de l’hommerie …
On dit qu’un pessimiste est un imbécile malheureux et un optimiste un imbécile heureux. J’ai choisi d’être une imbécile heureuse, autant que possible. J’ai hérité de petits objets en cuivre réalisés par mes arrières grands pères dans les tranchées.
Et ils les rendent plus vivants que n’importe quoi.
Je ne finirai jamais d’espérer même si, effectivement, les faits ne tendent pas à me donner raison …
Ma parigote, oui la mort appelle la vie. Tu vois, les arbres ont repoussé …
Il y a beaucoup de lumières autour d’eux – comme autour de tous les autres de lieux de misère – et j’en ai vu ! En me demandant toujours pourquoi et comment !
J’ai vu ce film merveilleux “un long dimanche de fiançailles” :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Un_long_dimanche_de_fian%C3%A7ailles_%28film%29
mais je sais que tu parles du film “Joyeux Noël” que je n’ai pas vu :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Joyeux_No%C3%ABl_%28film%29
Sais-tu que les soldats allemands ont rendu les honneurs à des soldats français qui se sont rendus après une résistance héroïque (cela paraît tellement vain cette résistance, hélas) .
http://batailles-1939-1940.historyboard.net/labelgique-f17/la-bataille-de-lille-t162.htm
Bises à toi.
Bises et je visiterais les liens et c’est de ce film dont je parle
Anne Ancelin Schutzenberger, la pionnière de la psychogénéalogie essaie de repérer quand elle travaille sur les arbres généalogiques s’il y a eu des hommes qui se sont retrouvés dans les tranchées et ont été gazés… car très souvent leurs petits enfants ont eux aussi… du mal à respirer et ont de l’asthme, et ce d’autant plus si le grand père s’est tu et n’a rien pu raconter au retour…
J’ai vu les deux films dont tu parles, qui montrent bien l’absurdité de la guerre. Malheureusement on ne retient pas les leçons de l’histoire et on recommence sans cesse, même si nous avons eu la chance d’être épargnés par la guerre depuis longtemps en Europe occidentale, ce qui n’est pas le cas dans le reste du monde.
L’homme est d’ailleurs le seul animal qui extermine ses semblables à grande échelle.
J’espère que ton voyage n’était pas consacré seulement à la guerre. Je t’embrasse.
- Venezia, en effet, tu as tout à fait raison de soulever ce point.
Je parlais l’autre jour avec un soignant qui m’expliquait comment parvenir à l’équilibre relativement à certaines de nos réactions (en m’indiquant par ailleurs comment les corriger, ). Et il me disait que nous nous coltinions des “héritages” dont nous n’avons pas idée et qui remontent parfois fort loin.
Cela va dans le sens du travail d’Anne Ancelin Schutzenberger.
Il m’a expliqué qu’il est très difficile de “guérir” complètement de réactions que, parfois, nous ne comprenons pas nous mêmes mais il m’a dit qu’une des techniques afin de parvenir à l’équilibre que j’évoque plus haut est de nous parler à haute voix. Penser ne suffit pas.
– Pat, c’est volontairement que je vais à Verdun et, également, mais cette fois deux fois par an environ, au Vieil Armand dont je parlerai plus tard.
Il y a des lieux qui “réunissent” toutes les douleurs du monde et je crois à la force des pensées.
Mais mon voyage a été consacré -en plus de la visite de quelques musées – à surtout écouter et voir travailler de merveilleux(ses) artisans, tellement heureux de partager leur passion et leur savoir.
Des authentiques, des taiseux comme dit ma parigote qui parlent lentement car ils pensent en alsacien.
Et je me suis enveloppée de la beauté de la nature, du si bel automne, de ce cocon qui se prépare dans un feu d’artifice magique, magnifique et généreux.
Bises
– ma parigote, bien le bonsoir !
Irène, sais-tu que le film Un long dimanche de Fiançailles est tiré d’un livre de Sébastien Japrisot ? Le livre est très bien fait, uniquement un échange de lettres… vite lu en plus, ça devrait te plaire !
Nansou, merci de la précision.
Je le savais, mais c’est bien d’ajouter cette information que j’avais omise. Je n’ai pas lu le livre, ni celui “paroles de poilus”.
Je dois avouer que – pour le dernier cité – je n’ai pas eu le courage d’aller au-delà de quelques pages …
J’ai lu l’article et vos commentaires avec beaucoup d’intérêt, je ne suis pas bavarde mais aujourd’hui j’ai envie de vous raconter une partie de mon histoire familiale intimement liée à la bataille de Verdun : mon grand père maternel, Laurent ROCHE, né en Algérie, d’un père venant du massif central et d’une mère espagnole, est parti lui aussi à la guerre avec tous ses « frères d’Afrique », défendre la mère patrie. Dans les tranchées de Verdun il a connu l’horreur, puis il a eu les pieds gelés et il a été gazé, mais pas assez pour en mourir tout de suite ; il a été soigné à l’hôpital d’Avignon, et une fois la guerre terminée il est retourné au pays. Là, il a rencontré Rose qui pleurait son fiancé tué à Verdun le jour de l’armistice. Aucun médecin n’avait dit à Laurent que son espérance de vie était très limitée. Il a épousé Rose, ils ont construit leur maison à eux deux (il était maçon) et ils ont eu 2 enfants. Ma mère, l’aînée, avait 5 ans quand il est mort… Ce fut un drame dont elle ne s’est jamais remise. Rose, veuve, a du vendre la maison pour acheter un commerce et élever seule ses deux petites filles, avec beaucoup de mal car la vie était dure. Elle n’avait plus le temps de donner de l’attention à ses filles, plus d’argent pour les gâter. ma mère devait aider, garder le magasin lorsque Rose était partie chercher ses approvisionnements, livrer les clientes le matin avant d’aller à l’école, clientes souvent méprisantes à son égard, essuyer les réflexions désobligeantes de la maitresse lorsqu’elle arrivait en retard, et comble de honte, aller chercher le colis de Noël à la mairie attribué aux “pupilles de la Nation ». Les fillettes se sentaient (à tort) traitées comme des mendiantes. Elles se sentaient pauvres et elles avaient peur du lendemain. Ma mère s’est alors juré de toujours travailler, toujours gagner de l’argent, de ne jamais en manquer. Elle avait souvent des bronchites et Rose lui mettait des ventouses en priant qu’elle ne fasse pas comme son père… (Toute sa vie elle a été essoufflée sans avoir de problème de poumons). Une fois majeure m’a mère s’est mariée, un seul enfant, moi, (un caprice !) il n’en fallait pas deux car il fallait travailler, s’expatrier en Afrique noire pour gagner plus, j’étais un paquet encombrant, et à 6 ans1/2 après un séjour au Sénégal et quelques mois en brousse en Côte d’Ivoire, on m’a tout simplement renvoyée chez l’autre grand’mère, pendant 3 ans… j’étais la 3ème génération touchée par les suites de Verdun. 3 ans sans ses parent à cet âge c’est terrible. A 9 ans 1/2 on me remet dans l’avion et me revoilà à Abidjan, j’avais changé, mes parents aussi, on ne se connaissait plus, ma mère n’a pris aucun congé pour m’accueillir, la solitude me collait à la peau, j’étais timide et même sauvage et c’est à ce moment là, à la rentrée des classes, que j’ai rencontré Irène. C’était encore un grand bébé, toute ronde, la peau laiteuse, des fossettes et de grands yeux bleus qui me regardaient arriver, moi toute maigre avec des boucles brunes et des yeux noirs, la fixant dans le rang… nous ne nous sommes plus quittées ! elle est devenue ma soeur de coeur, moi la fille unique, en mal de fratrie, je l’enviais lorsque le matin je la voyais arriver avec son petit pain au chocolat, sa petite soeur accrochée à son bras droit et son petit frère trottinant à sa gauche ; c’est ensemble que nous avons fait connaissance avec Mamadou et Binetta dont elle vous a parlé… et toujours nous resterons amies. Jamais elle ne s’était exprimée sur cette grande guerre, nous avons encore beaucoup de choses à nous dire !
Tous les ans je traverse la région de Verdun à la Toussaint, en allant au Luxembourg, à chaque fois mon coeur se serre mais je ne m’y suis jamais arrêtée, ce serait trop pénible. Pour la fin de l’histoire je dois vous dire que Rose a été obligée de rentrer en Métropole en 1962 et qu’elle est morte à…. l’hôpital d’Avignon.
Manou, ma chère Manou, j’ai le cœur tout serré et en même temps je suis infiniment soulagée que tu aies eu le courage de raconter cette partie de ta vie, de la vie de ta famille. Cela a dû te coûter et, en même temps te faire du bien.
C’est vrai que nous n’en n’avons jamais parlé ensemble. Comment est-ce possible ?
Ce que tu dis de ta mère que j’ai bien connue me fait penser à la remarque de Venezia concernant les problèmes pulmonaires et de souffle des descendants de personnes ayant été gazées. Et tu vois, ma chère Manou, maintenant, tu peux maintenant comprendre, même si c’est difficile, la conduite de ta mère.
Il est vrai que nous reproduisons ou nous opposons quant aux chagrins et manques que nous avons subis ; moi, ce fut de tout donner, de donner tout l’amour que je n’avais pas reçu alors que ta mère est restée rétractée.
Manou, il m’est arrivé, il m’arrive encore de me poser la question sur la façon dont je mène ce blog et, de manière douloureuse certes, tu me confortes dans ce que j’ai décidé d’en faire.
Certes nous réagissons tous différemment mais, si tu le désires, je te tiendrai la main et nous irons ensemble à Verdun et même si tu pleures, tu relâcheras ce qui certainement, toi aussi, pèse sur ta vie.
Je t’embrasse très fort et je te remercie de ton témoignage tellement émouvant.
Tu vois Irène, continues de veiller
Nous sommes tous un peu beaucoup de ces jambes cassées et coeurs fêlés, avides de paix et de communion
Le témoignage de Manou est vraiment émouvant. C’est bien triste de constater que plusieurs générations sont touchées par ces évènements d’un autre temps. ça doit te faire du bien de sortir ces émotions et comme dit Irène aller à en pèlerinage à Verdun te permettrait peut être de boucler la boucle et d’en finir avec ce drame qui a marqué ta famille comme d’autres.
Un moment donné, même si c’est douloureux, il faut poser les fardeaux qui nous écrasent si on ne veut pas devenir des victimes soi-.même, pour se donner la chance d’entrer dans une autre histoire, de briser le cercle des malédictions. Mais c’est sans doute plus facile à dire pour moi qui n’ait pas de racine.
Irène, tu doutes encore de l’utilité de ton blog? Même si tu ne reçois pas la visite que tu espères, ton blog est un lieu de rencontre important pour bien d’autres qui t’apprécient et apprécient ce que tu fais. Je trouve aussi que le rôle de soeur de coeur te va très bien.
Je vous embrasse toutes les deux
Ma parigote et toi, Pat, je suis très honorée de vous avoir dans ma vie.
Je ne peux parler que pour moi, mais moi aussi je suis très honorée et heureuse de t’avoir dans ma vie. Tu sais que tu comptes beaucoup pour moi.
Je t’embrasse
Plus qu’un honneur , une faveur comme on en trouve dans la vie quant on l’aime
et que l’on se sait apte au bonheur
Bises
Tu es notre veilleuse, comme tu le dis si bien, mais surtout notre lumière, Irène.
Merci d’avoir parler de ce douloureux et terrible moment de notre histoire, moi aussi descendante d’un gazé qui a eu juste le temps de fonder sa famille avant de mourir de la guerre des années après.Ton histoire, Manou, est bouleversante, merci pour ce partage et de nous rappeler que tous les actes ont des conséquences et parfois sur des générations et des générations.
Bonjour Zsa Zsa, j’espère que tu vas bien et je suis heureuse de te lire car je pense que tu dois être bien occupée.
Sans parler de ces circonstances aussi terribles, aussi tragiques, tous nos actes ont des conséquences et nous devrons prendre garde à éviter de blesser car, à notre modeste échelle personnelle, c’est à chacun de veiller à la paix autour de lui.
Manou sera réconfortée de te lire, elle qui a eu le courage de nous raconter l’histoire de sa famille dont elle ne m’avait jamais parlé. C’est dire si nos déchirures et nos douleurs sont parfois tellement profondément ancrées en nous qu’elles ne remontent pas jusqu’à nos lèvres …
Bises à toi et à Pat et ma parigote.