Petite Fée marchait doucement, les larmes roulaient sur ses joues. Lentement, c’est tout juste si elle s’en rendait compte.
Elle marchait dans la forêt enneigée ; sa robe longue s’imbibant de l’eau de la neige pesait de plus en plus lourd, comme son cœur.
Non, elle ne voulait plus, elle ne pouvait plus … la tâche était trop lourde. Un travail qui ne finissait jamais, qui ne finirait jamais.
Et pourtant, tout ce qui, d’habitude emplissait son cœur de joie était là : le ciel bleu profond, si profond ; Le froid sec le rendait encore plus lisible et les étoiles resplendissaient, clignotaient. L’odeur des sapins, celle des mélèzes et tous ces cailloux petits ou non qu’elle aimait tant ramasser et regarder comme pour y lire dedans.
La neige crissait doucement, brillait et même scintillait. Les larmes multipliaient toutes ces lumières jusqu’à l’aveugler.
Elle ne voulait plus faire semblant de ne pas voir ce qui blessait son âme.
Brusquement, elle heurtât monsieur le bouleau ;
- Hé la belle, je suis là ! Bon, je ne risque rien, moi …
- Bhurga * ( nom générique anglais birch, qui désigne toutes les espèces de bouleaux, est d’origine sanscrite (bhurga) et signifie « ce sur quoi l’on peut écrire ») excuse-moi
pria Petite Fée, s’appuyant contre la robe de son ami qu’elle connaissait bien. Ce patchwork dont elle admirait les couleurs, cette alternance de noir et blanc : la nuit-le jour, le Ying- Yang …
Et, pour se faire pardonner, elle entoura le tronc de son ami d’un beau ruban rouge.
- Quel honneur, mon amie … Mais puis-je savoir ce qui te bouleverse à ce point ?
- Tout, Bhurga, tout. Je ne supporte plus mon impuissance, je ne vois que bagarres, souffrances
- Je t’arrête, Petite Fée ! Qu’y a-t-il de nouveau sinon ton regard qui se tourne du mauvais côté ? Un peu de fatigue peut-être ?
Et, dans un grand éclat de rire, Bhurga enveloppa Petite Fée de ses bras et lui dit :
- En route, accroche-toi !
Ils survolèrent de nombreux pays. Les gens – ceux qui avaient les yeux ouverts, les vrais, ceux de l’âme – chargeaient les femmes de la famille de déposer des crêpes et des laitages devant le premier bouleau venu.
- Tu sens bon, Bhurga …
- Oui, le cuir de Russie peut-être ! As-tu ta rune Petite Fée ?
- Évidemment !
Et elle sortit de sa poche sa Rune sacrée, gravée sur un morceau d’écorce de sa monture.
(objet personnel)
- Excuse-moi, Petite Fée, n’as-tu point omis de boire de ma sève ce printemps ? Cela expliquerait ton léger problème … Ah, je pourrais te punir en te fouettant mais ma déesse Birka (divinité tutélaire des bouleaux) n’apprécierait pas !
Petite Fée reprenait ses esprits et se sentait confuse …
Ils survolaient le Japon et les Shintoïstes, à leur tour, rendaient les honneurs à Bhurga.
- Nous arrivons bientôt, Petite Fée.
- Où ?
- Décidément, tu n’es pas encore remise ! Mais, voyons, nous allons chez moi, en Bouriatie, près du lac Baïkal.
La nouvelle de l’arrivée de Bhurga et Petite Fée était – par d’étranges et mystérieux canaux –déjà parvenue dans le village natal de Bhurga.
Peut-être fêteront-ils avec nous « sagaalgan » se disaient les habitants.
Le chaman, interrogé sur cette éventualité refusât sagement à se prononcer et le Lama, très respecté – ami du chaman – confirma qu’ils étaient de trop piètre nature, relativement à la déesse Birka, pour tenter seulement de deviner ses intentions. L’église orthodoxe toute proche, par la voix de son archimandrite, adoptât la même position.
- Préparons nous à accueillir nos hôtes avec les honneurs, ne posons aucune question.
Et, surtout, ne cherchons pas à savoir … (il y avait quand même un peu d’hypocrisie dans cette dernière affirmation …)
Bhurga survolait maintenant la « mer sacrée » (le lac Baïkal) et Petite Fée en admiration devant cette immense étendue, brillante, mouvante, vivante, retrouvait son âme.
En bas, se posait un autre problème : chacun se proposait d’accueillir les voyageurs dans sa maison et ils ne parvenaient pas à trouver la meilleure solution.
Enfin, les trois Sages ayant longuement réfléchi décidèrent que tout le village allait préparer une yourte et que Bhurga n’aurait plus qu’à s’y installer en compagnie de Petite Fée.
Les feux de joie crépitaient quand les voyageurs se posèrent en douceur dans le village natal de Bhurga. Entourés, fêtés, aucune question ne leur fut posée : c’est cela l’amitié. Toute la nuit ce ne furent qu’alternance de rires, de prières (Dieu reconnaîtrait les siens !), d’échange d’informations.
Petite Fée ayant retrouvé toutes ses facultés, glissa un mot à l’oreille de Bhurga, vers la fin de la nuit, et ce dernier annonça avec solennité à l’assemblée qu’ils fêteraient sagaalgan tous ensemble.
(Sagaalgan, fête du mois Blanc (Nouvel An selon le calendrier lunaire) reste la fête principale chez les Bouriates. Selon la tradition tibétaine le Nouvel An commence presque à la fin de l’hiver, à la nouvelle lune du février.
On célèbre le Nouvel An au matin du premier jour et pas à minuit. Les produits blancs du lait sont obligatoires sur la table de la fête. La couleur blanche symbolise le bien-être. Sagaalgan est étroitement lié à la conception bouddhiste du monde et reflète la base spirituelle du peuple bouriate. Tout le monde se réuniet dans les datsans pour célébrer le Nouvel An. Pendant la fête on brûle de vieilles choses avec lesquelles, selon la tradition, tous les péchés de l’année précédente brûlent aussi.)
Installés dans leur yourte, Bhurga adoptât tout naturellement la position qui servait au Chaman pour trouver les meilleures solutions dans sa recherche du bien-être des habitants du village.
Qu’elle magnifique conte rempli de sagesse et de vérité…j’ai adoré le lire….et finalement qui m’a bien éclairée!!!
de magnifiques fêtes remplies de lumières à toi également
gros bisous
Très joli conte qui remplit l’esprit et nous donne à penser….Merci Irène de ce moment précieux !
J’aime les arbres, ton conte, et le regard du coeur tourné vers le bon, le merveilleux, l’impossible possible
et toute cette vie à s’accomplir, c’est bon
Bises Diva
un conte qui me transporte dans d’autres lieux avec d’autres personnes un conte qui ouvre le coeur vers les choses essentielles et non futiles de la vie Merci pour ce morceau d’espérance ma douce Irène
Irène,
j’ai plané avec petite fée et son copain bouleau jusqu’au lac Baikal.
Il y a quelque années, j’avais vu une magnifique exposition de photos sur la Taiga au musée de la Chasse à Paris… depuis, j’en rêve. Ton recit m’a rappelé l’émerveillement que j’avais ressenti à découvrir ces paysages
Irène, quel joli conte ! J’ai adoré te lire surtout que je suis très friande des contes.
Merci beaucoup pour cet agréable moment de douceur et je te souhaite également de passer de très bonnes fêtes de fin d’année.
Magnifique Irène,merci pour ce fabuleux compte!!Tres bonnes fêtes a toi et à tes proches .Bise
Flocréa, merci et sache j’ai été touchée par les actions que tu mènes, de ton côté, concrètement.
Bonjour Kat ! Tu dois connaître bien des contes dont tu as du régaler tes élèves …
Mais celui-ci n’est pas pour les enfants : les petits n’ont point de doute, ils n’ont pas encore expérimenté ce que nous devons mettre de côté pour vivre aussi sereinement que possible.
Mystic, la plupart de tes produits nous emmènent dans ce monde de profondeur, tout naturellement …
Ma parigote, c’est toi qui devrais écrire des contes, toi la magicienne des mots (et des macérâts …). “L’impossible possible”, je n’oublierai pas … C’est beau.
Bises à toi.
Bonjour Venezia, je fréquente désormais une blonde aux yeux bleus qui connaît le lac Baïkal et qui me parle de ses rencontres quand elle s’y rend.
Le bouleau est mon ami et ses récits m’ont inspirée quant à la destination de Burgha et petite fée.
J’ai des photos de la taïga à ajouter sur l’article mais wordpress est capricieux et je ferai peut-être un diapo, ainsi elle ne seront pas perdues.
L’essentiel est leur domaine là-bas.
Colchique, les contes ont souvent une signification moins transparente que celui-ci et j’ai un article en préparation à ce sujet.
Merci à toi car je te remercie – ainsi que toutes celles qui le font – d’avoir pris la peine d’écrire ce commentaire.
Cris, bonjour !
Merci de ta visite, je suis heureuse que tu aies apprécié.
Quelle jolie façon d’aller vers Noël. Un très joli conte, plein de sagesse et de poésie enchanteresse. Un conte à raconter, puis à méditer. J’aime les contes de fées surtout lorsqu’ils sont racontées par une Fée.J’ai en prime une petite musique en fond sonore, ce qui ne gâche rien.Merci pour ce beau moment d’évasion.
la Lune d’hiver m’a apporté une pluie d’étoiles, éternelles et scintillantes comme l’amitié
et les étincelles laissées dans mes yeux
Diva je t’aime et te brasse
Ma chère Lolita San, si ce modeste conte t’a fait passer un heureux moment, j’en suis comblée car je n’ai pas tes talents de conteuse …
Ma parigote, puisque tout est symbole, je sais que tu les auras tous devinés.
Car Lune d’hiver est très à l’écoute et comprends vite ce que le cœur désire exprimer.
A bientôt et douces bises.
Un jour, ce jour, on dit Noêl,
jours de grâces et de lumières
tes yeux bleus se sont ouverts pour aimer, partager et dire
comme la vie est belle, comme tu sais la parer, et des des fois la soigner
Bises amie qui porte de si belles années
Bonjour ma parigote à moi !
C’était bon et doux, c’était comme j’aime, comme nous aimons.
S’il faut trouver une faille, c’est ce gros pataud de chien de ma fillotte qui a renversé le café et sur la moquette blanche ! Bon, je plaisante.
Beaucoup d’émotion aussi, de la bonne, de la belle et plein de lumières.
Et c’était joli, j’en oublie même que cela me fait avancer d’un chiffre : je n’ai pas souffert, je n’ai rien senti !
J’espère et je souhaite que ton Noël est lumineux et tendre.
Douces bises.
Merci de ce magnifique commentaire Nath' qui ravira les lecteurs d'Akimiti.
Oui, il faut remonter aux sources …